Kayak: descente du fleuve Ebre en Espagne, 700km

Descente Ebre kayak

L’Ebre ?

Le plus puissant des fleuves espagnols. Long de 928km, il traverse le pays en prenant sa source à proximité de l’Atlantique et se jette dans la Méditerranée de l’autre coté. Difficile de trouver plus d’informations, est-il navigable ? Par quelle embarcation ? Problèmes et dangers probables ? Je ne trouve que quelques infos sur la partie supérieure qui possède des rapides classe 4, impensable en kayak de mer pliable (Narak 550 de Nautiraid).

Le projet:

Descendre le fleuve sur la plus longue portion possible, bivouaquer tous les soirs et être totalement autonome.
Un peu au hasard, j’estime que les rapides auront diminué à la ville de Miranda de Ebro. Choix également dicté par la liaison aisée en bus avec Bilbao que je peux rejoindre en covoiturage depuis Bordeaux. 4 jours de préparation au total, ces deux semaines devant initialement être consacrées à un périple en montagne abrogé par une météo trop mitigée.

Trajet kayak Ebre 1

Récit:

Mardi 26 mai, J0: Le matin, acheter une carte routière de l’Espagne, 1/800.000, 1cm pour 8km, précision impeccable. En Laponie c’était une 1/400.000, le prochain trip je pars avec une mappemonde. Le covoiturage de 12h30 arrive 3h plus tard, attente devant la gare SNCF, le comble. L’idée de pagayer ce soir s’envole.

Le conducteur est un marrant, GPS en panne et son téléphone ne capte pas, mais il gère « je connais bien Dax, enfin, direction Dax, c’est un panneau que je vois souvent », « tu vois, Bayonne, Pau, Tarbes, c’est la bonne direction, c’est proche de la frontière », « l’autoroute ? Non les nationales ».

Arrivée à la gare routière de Bilbao vers 22h, je prends mon billet pour Miranda de Ebro pour 14h le lendemain, rien plus tôt. J’interpelle deux policiers en patrouille pour connaitre les spots de bivouac de la ville, « nous vous conseillons vivement l’auberge de jeunesse ». Ok. 19€ petit dej inclus et la possibilité de laisser les affaires pour se balader le lendemain.

J1: Visite de Bilbao jusqu’au musée Guggenheim, achat d’un bouquin au rayon francophone de la Fnac, L’élégance du hérisson. Peur de devoir raccourcir les journées à cause du mal de bras et petite vengeance contre l’économie de poids constante.

Rejoindre la gare routière avec le barda, comme la veille, une pause tous les 10 mètres, plus de 40 kilos d’équipement, je la sens bien là l’économie de poids.

Trajet en bus d’une heure, Miranda de Ebro, l’arrêt est à 100m de l’Ebre. Montage du kayak tranquillement sous les regards interrogateurs des passants. Surtout d’un chien qui tire tant et plus pour venir inspecter la chose, à l’autre bout, une jolie espagnole. L’idée d’un kayak deux places me traverse l’esprit avant de s’évanouir face à mon spanglish laborieux. Mise à l’eau. 200m plus loin, un barrage, elle m’a suivi sur la berge et m’aide à transporter le kayak de l’autre coté. Peut être qu’en se serrant un peu dans l’hiloire…

Je profite d’un petit kilomètre de calme avant de réaliser que les rapides ne sont pas terminés, ils s’enchainent. J’en mène pas large, trempé sur mon bout de tronc branlant avec mon kayak retourné rempli d’eau. Je respire des moucherons et tousse à m’en décrocher un poumon. Pas évident de tenir l’équilibre et de pomper la flotte en même temps. Leçon apprise, ego remis en place; bien regarder avant de s’engager et marcher à coté du kayak autant que possible (pourtant, c’est pas comme si je découvrais les plans foireux).

21h, déjà rincé, bien la tente autoportante pour se poser sur les lits de gravier où aucun ancrage ne tient. Bien de la voir s’envoler et aller la chercher dans les broussailles 15m plus loin. Trempé, fait pas bien chaud.

J2: Réveil à 9h, les affaires laissées pendouiller entre les deux toits ont un peu séché, bien, cela change de l’hiver. Une petite photo du kayak avant de partir ? Surprise, l’objectif est rempli de condensation et la batterie est presque à plat. Peut être un peu surestimé sa résistance à l’eau… J’aimerai avoir le détachement du type qui compte sur ses souvenirs et qui revient les mains dans les poches, juste avec son petit carnet griffonné. Moi je préfère m’échiner à souffler dans tous les trous de l’appareil, le secouer, pester… L’APN en façade au dessus de l’écran semble moins affecté, ce sera pratique pour cadrer.

Départ à 10h, 100m plus loin, retour à la réalité de ce fleuve: rapides non prévus, bataille avec des branches basses, je perds mais le kayak gagne, lui a le droit de passer mais sans moi, je le rattrape grâce au leash de la pagaie. Un peu de nage dans le courant avant de trouver un coin plus calme pour le vider.

Nouveau rapide après moins de 400m, mauvais choix de coté, obligé de remonter le courant à pied dans l’eau et de traverser en crabe en pagayant face au jus. Pour l’explication: il y a toujours un bord où il est plus facile de marcher à coté du kayak (moins de fond, moins de courant, moins de branches basses, moins de rochers), l’expérience permet de le détecter plus rapidement.

Premier barrage hydroélectrique, avancer avec prudence près du bord, chercher où sont les siphons, les zones à courant. Pas de passe à kayak, un mur lisse en à pic et les deux rives aussi encombrées l’une que l’autre. Je me fraie un chemin dans les roseaux et les arbustes, grimpe un talus et émerge dans une vigne ensoleillée. Reconnaissance à pied sans matériel, à travers les taillis, je vois que le barrage est passé mais impossible de descendre le kayak. A 500m le sous bois s’éclaircit, en cassant quelques branches cela passera.

Deuxième aller retour avec l’eau (10L pris à la station service de Miranda de Ebro), troisième avec le matos et la nourriture (9kg), quatrième avec le kayak. Quel bordel à trimballer seul, 30kg sur 5 mètres et demi de long. Mais cela me permet de justifier les entrainements au poids du corps. Tellement que je fais 10 pauses.

2 barrages plus tard, j’abandonne l’espoir de trouver des facilités pour les bateaux dans le coin. Les rives ne présentent aucune trace de passage et c’est une merde sans nom pour contourner ces tas de béton. Le bon coté: c’est sauvage à souhait, même les barrages sont engloutis par la végétation. Des oiseaux en pagaille, des arbres immergés ne laissant dépasser que quelques branches tannées par le soleil, des souvenirs des crues sur les berges, emmêlement de débris divers, guirlande naturelle.

Entre deux eaux plates grâce aux barrages, les rapides continuent à s’enchainer. L’adrénaline s’épuise et le jeu devient fatiguant. Certains sont faisables et avec une attention particulière motivée par l’absence de gilet et de casque (…) j’arrive à trouver un peu de plaisir dans les vagues. Mais quand l’une d’elle apparait plus grosse que prévue, émergeant de derrière un rocher à 2m de la proue, c’est beaucoup moins drôle. Kayak retourné, pied coincé dans l’hiloire, lunette perdue, bringuebalé dans le jus, puis essayer de nager jusqu’au bord, pieds en avant pour les pierres, tenir péniblement la vache morte en même temps et souffler un bon coup quand enfin il est possible d’avoir pied sans se faire emporter. Ce n’était que le troisième ou quatrième retournement de la journée..

Arrêt à 19h30, bivouac au dessus de San Asensio. Leçon 1 du jour: la jupe, c’est bien de la mettre. Leçon 2: c’est les branches basses dans la courbe extérieure du méandre qui sont les plus dangereuses. Plus que les vagues, plus que les rochers.

J3: Note manuscrite pour cette journée: « Encore des barrages, plein. Je ne sais même pas me les rappeler tous, et plein de rapides aussi. Nouveau genre de barrage, plat sur le haut, à raz de l’eau, on peut gambader dessus, faire gaffe à ce que le kayak ne bascule pas. Mais pas beaucoup plus évident pour descendre de l’autre coté ».

Un barrage un peu plus gros que les autres avec un panneau d’infos à coté, il fait 17 mètres de haut. Son lac de retenue m’a permis de bien avancer, de profiter du paysage, des vergers et des champs de temps à autre, beaucoup de forêts, quelques pécheurs, c’est calme, peu de soleil, il fait bon, les lunettes ne me manquent pas.

Au moins il y a un chemin à coté pour celui là. Portage dans la moyenne, quelques centaines de mètres. Les loutres ont donné un goût de plastique dégeu à l’eau, je l’ai jeté je sais plus quand, je bois celle du fleuve maintenant. Un aller/retour de portage de moins à faire. A la première reconnaissance, de l’autre coté du mur de béton, peu de fond, peu d’eau coule, beaucoup de rochers, étrange. Deuxième aller retour, j’entends une vanne s’ouvrir, une (très) belle vague en sort. Troisième aller retour avec le kayak, le niveau monte à vue d’oeil, les rochers disparaissent un à un, il seront pile à hauteur de quille et invisibles.

Rétrospectivement, pourquoi s’engager là dedans ? Peut être car le jus augmente de plus en plus et qu’il me semble impossible de partir plus tard. Puis dans mon imaginaire, un lâcher important d’eau est accompagné d’une sirène. Pas de sirène, pas de danger. En tout cas, il va y avoir du mouvement, un essai préalable à pied a montré qu’il y avait maintenant trop de fond même sur les bords pour y aller en marchant. Gants enfilés, vérifier 3 fois l’arrimage complet des affaires, retirer la visière pour ne pas la perdre. La préparation du type qui a confiance en lui. Vagues sur vagues, pagayage forcené, cela passe sans dégât ni retournement.

Il est agréable d’être observé par la faune sans la faire fuir. Bivouac sur une plage de galets, 19h30 encore. Tibias tuméfiés et griffures. De ces journées passées, une sensation étrange, comme une dissociation corps esprit mélangée au pragmatisme du « c’est comme ça, autant le prendre bien ». Déambuler dans la vase fétide ne me provoque aucune réaction particulière, tout comme les orties, les ronces, les portages épuisants. Aucune mauvaise pensée, ni de bonne, pas de récriminations, juste une action à mener à son terme, l’une après l’autre. Focalisation ou faire le vide ou les deux.

Leçon du jour: avant de décharger le kayak, vérifier que c’est le bon endroit pour passer, cela évite beaucoup de manip..

J4: En fait, ce fleuve n’est qu’une succession de barrages entrecoupés de rapides. Plus de barrage aujourd’hui que les deux jours précédents cumulés. L’hydroélectricité, plaie du kayakiste.
Au matin, il m’a été possible de pagayer 30min d’affilée, ensuite, cela n’a pas dépassé le quart d’heure assis dans le kayak. Nouveau phénomène ou du moins plus marqué: les nombreux passages à bas fonds où les pierres affleurent: obligé de pousser à de nombreuses reprises. Tenir le kayak en laisse après avoir bricolé un bout noué à la ligne de vie. Les barrages des jours précédents cultivaient l’intrigue, l’étendue plane avant d’y arriver, la découverte de l’édifice, la quête du meilleur passage. Ceux d’aujourd’hui ont perdu tout charme. Pousser dans les joncs, ahaner dans les ronces, escalader des rochers grillagés, faire l’équilibriste avec 30kg fragile à bout de bras. Et recommencer 5 kilomètres plus loin.

Il faut s’imaginer ce que c’est de tenir un kayak par le coté tout en marchant sur des galets savonnettes. Enjamber les rochers, le faire glisser dedans, trouver les alignements de creux et de vagues pour que ses 5 mètres restent bien droit, toujours bien dans l’axe du courant, avec le risque constant qu’il se mette en travers et prenne tout le jus dans le flanc. Et cela arrive plus souvent que voulu, quand il y a peu d’obstacles, rattraper une extrémité et le laisser faire un demi-tour complet est une tactique efficace. Mais quand il n’y a pas la place, être prompt à le soulever le plus possible semble être la seule solution valable.

Passage dans une ville, Logrono, il me faut absolument des lunettes de soleil. J’accoste, planque légèrement mes affaires et hisse le kayak sur la berge, je pars, monte sur le pont qui surplombe l’endroit où tout est posé, un groupe de pêcheurs est arrivé, ils inspectent d’un peu trop près mes affaires, y retourner, essayer de sympathiser et d’expliquer la situation, croiser les doigts. Je parcours la ville en courant, entre chez plusieurs opticiens, trop cher, j’aperçois un Claire’s au loin (bitouterie/accessoire fantaisie pour dame), parfait, je ressors avec une superbe monture aux verres teintés en dégradé, 7€. Retour sur le pont, le kayak a été mis à l’eau, merde, abrutis. Explication: « on a coincé un leurre, on a voulu utiliser le kayak pour aller le chercher mais on a pas réussi à monter dedans, trop instable ». Pas besoin d’anti-vol en fait. Je m’occupe de leur ligne, il m’aide à porter mes affaires et le kayak de l’autre coté du barrage, on discute, rencontre agréable finalement.

Un rapide impossible à passer en marchant, il forme un méandre en épingle à cheveux où je n’ai pied nulle part, la première partie est visible mais pas la suite. La berge est trop encombrée pour espérer une reconnaissance. Le palpitant s’est accéléré, les affaires sont solidement attachées, un petit mot à l’Univers et se lancer. La joie ressentie quand ça se passe bien vaut le risque.

Pieds moisis, un ongle se décolle, ou alors c’est les chocs ? Départ 9h35, arrêt 19h45, c’est mieux. En passant, c’était jolie aujourd’hui, une petite cascade bucolique, toujours autant d’oiseaux à longues pattes, une pause sous les arbres, un peu de nage et de bronzage.

J5: Départ 9h38, premier rapide avec bas fond à 9h47, second 10h05, troisième 10h17, quatrième 10h31, un peu de repos 20 minutes, barrage 1, puis barrage 2, et cascade, un rapide, portage sur 100m, il est 13h, barrage 3. Et là miracle, j’avance bien en ne m’arrêtant qu’à de rares occasions (zones larges avec cailloux à fleur d’eau). Des petits rapides s’enchainent, vrais tapis roulants qui doivent me faire gagner quelques km/h.

Zone à carpe, elles batifolent comme rarement j’ai vu. Des dos énormes s’agitent au dessus de la surface, arrêt, il y en a plein, une trentaine. En attraper une à la main serait fort. Que c’est rapide, je me ballade dans la zone, tente des ruses, rien n’y fait. Retour au kayak, 5 se dirigent vers moi, viser la plus grosse, se jeter dessus et se rendre compte que c’est hyper musclé et glissant. Je finis par réussir à l’enrouler dans la jupe du kayak. Deux photos et je la remets à l’eau. Je pue le mucus. Plus de temps à me doucher qu’à l’attraper.

Le parcours est génial, l’impression de bien avancer. Mais sans les pauses forcées, l’aprem parait s’éterniser. Barrage à 19h20, pas trop compliqué à passer, arrêt à 20h. Cela ressemble plus à l’idée que je me faisais de ce projet. Presque la même distance parcourue aujourd’hui que les deux jours précédents cumulés.

J6: Mal au cul, matin: sorti 3 fois du kayak, un portage, deux tirages, des heures assis, les barrages me manquent. Début d’aprem, enfin un, mais un superbe, petite digue, une marche sous l’eau pour descendre facilement du kayak, puis le fleuve juste de l’autre coté, même pas 20m à faire en pente douce. Pas plus de 10min pour passer. Retour au kayak une bonne partie de l’aprem, pause baignade 50min, passage à Tudela. Pas longtemps après, un barrage, l’embouchure du canal impérial de Aragon (que j’hésite à prendre) puis le deuxième juste après. Beaucoup plus chiant, portage sur 200m, mise à l’eau dans les effluents de la ville, pas assez de fond, marche sur pierres dégeu, glisser et se rétamer dedans.

Départ 9h50, arrêt 20h25, distance satisfaisante, pluie sans nuage au dessus, beau paysage clair-obscur.

Ce matin j’ai aidé un pêcheur, il faisait des grands signes sur la berge. Depuis quelque temps j’en croise avec des cannes à carpe, le fil part droit au milieu du fleuve. Je pensais qu’il m’alertait pour ne pas rentrer dedans. A force de gesticulations et d’incompréhensions, je vais le voir, je ne comprends absolument rien mais je me retrouve avec une épuisette d’un mètre carré à la main. Tilt. Sa carpe est accrochée quelque part, il veux que j’aille la chercher. Suivre le fil, la dégager des branchages en la plaçant dans  l’épuisette et enlever l’hameçon. J’ai donc d’un coté un poisson d’une dizaine de kilo dans une épuisette que je dois maintenir au dessus de l’eau, de l’autre la pagaie et pendant ce temps le kayak qui dérive avec le courant. Problème, pagayer à une main ne fonctionne pas. Rebelotte, je mets la carpe sur mes genoux et peux enfin pagayer. Le pêcheur est content, sa copine aussi, moi je re-pue le poisson.

J7: Record de temps assis dans le kayak, 9h15 à 12h30, puis second, 13h à 16h30. Sorti 4 fois du kayak ensuite, 2 pauses, 1 photo, 1 tirage (mauvais choix de veine de courant). Passage de canyons désertiques, falaises abruptes. Grandes étendues de gravier parsemées d’arbres gigantesques déracinés. J’ai à nouveau aidé un pêcheur, mise à l’eau d’un petit silure (60cm), première fois que j’en touche un, cela pue moins que la carpe et ça a une jolie tête (avis très subjectif).
Beaucoup de piqûres d’insectes divers.

J8: Au matin, ma main droite ne se ferme plus, impossible de serrer quoi que ce soit. Canal carpien ? Inflammation ? Je l’agite façon marionnette et n’utilise que la gauche. Au moment de décamper, cela va mieux. Seulement deux barrages, la journée est longue, alternance de sauvage dans les bois, de civilisation dans les champs. Passage à Zaragoza. Deux pauses dans la journée. En fin d’aprem, moucherons en nappe, difficile de ne pas en respirer et en avaler, j’en ai plein le tee-shirt, collés à mon torse. Obligé de pagayer courbé, la tête basse, mal au dos.

Ce fleuve n’a rien de monotone. Même si l’enfermement entre ses deux rives cache sûrement bien des paysages de la région, je ne me lasse pas des visibles. Les rideaux d’arbres sont tous différents, les joncs, les arbustes, les plantes aquatiques se mélangent toujours dans des proportions différentes, la granulométrie des bancs de gravier m’occupe, les techniques de chasse des échassiers m’inspire et les collines dégarnies donne du relief à l’ensemble.

Le moral cède sa place à la fatigue. Je me fixe souvent un horaire à dépasser le soir avant de chercher un spot de bivouac. Aujourd’hui c’était 20h puis 20h15. Il est 20h13, un barrage apparait au loin. Pas le courage de me le faire au matin, j’y suis à 20h20. 7 minutes pour passer en force, descendre les rochers en portant le kayak au complet en une fois (40kg) puis se frayer un chemin dans la végétation en contre bas. Des simulies à la pelle, ces petites mouches à la piqûre terrible.

Aucun endroit où se poser de l’autre coté. 20h40, enfin un accès pour monter sur la berge. Des insectes forment un nuage de plusieurs dizaines de mètres cube à quelques mètres au dessus du sol. Vrombissement incroyable dont l’intensité va et vient avec le vent. Je m’endors trop vite pour que les boules quies me manquent.

Note manuscrite du jour, caractères sur 4cm de haut: CLAQUÉ. Départ en kayak à 9h15, fin 20h40, plus de 11h à pagayer, trop ?

J9: L’après midi, vent de face, des vagues se forment, elles moutonnent. Sur la carte, je n’avance pas, faute aux nombreux méandres, le jeu consiste à les couper au mieux en essayant de prévoir dans quel sens ils tournent. Rencontre avec un couple de français installé sur la berge, ornithologues amateurs, nous trouvons de quoi discuter, ils me permettent de nommer un oiseau élancé que je vois souvent, mon préféré, le héron pourpré.

Fin de journée, traversée d’un barrage couvert de végétation, les nuages de simulies sont encore plus denses que la veille. Narines, bouche, yeux, rien n’y échappe, l’impression de comprendre les bovins assaillis, gesticulations vaines. Coucher les roseaux pour passer, trainer le kayak, puis descendre le saut en deux aller-retours. Jambes boursouflées de piqûres. Déjà la veille, réveil dans la nuit et recherche hystérique des antihistaminiques oubliés, grattages frénétiques.

9h à 20h15, nouvelle journée de 11h, permet d’apprécier les changements de ce fleuve. Parfois large de cent mètres ou plus, constellé d’îles, il devient rivière paisible ou torrent tumultueux aux berges mangées. Joie des hirondelles qui trouvent là des parois inaccessibles à la terre meuble pour y fonder des colonies nombreuses.

Problème à la main non réglé, toujours en vrac le matin, plusieurs engourdissements en cours de journée, secouer la main en l’air réduit le phénomène.

Note: quand on bout l’eau et qu’il fait 30 sous la tente, on attend longtemps avant de manger.

J10: Matin, départ face à une barque au milieu du fleuve. Deux pêcheurs, l’un au moteur, l’autre s’échinant canne en main. Jamais vu un type autant forcer pour monter un poisson, ce sont deux tchèques venus avec leur club passer 10 jours sur les bords de l’Ebre. 45 minutes de curiosité plus tard, apparait à la surface un morceau ondulant de près de 2m de long. Les deux mains du pêcheur dans la gueule, le silure est hissé dans le bateau, il sera relâché plus tard, le temps de le montrer aux copains.

Le fleuve est large comme jamais et prend le nom de mer d’Aragon. Barrage important en prévision, vent de face dès le milieu de l’aprem, difficile. En contre partie, l’eau moins brassée est plus translucide. Observer le fond devient une nouvelle occupation. Beaucoup de pêcheurs, parfois dix lignes par poste qui zèbrent la surface m’obligeant à des détours nombreux. Ils s’accaparent un peu trop la surface à mon goût, mais étant le seul navire, notre partie pèse peu. Nouvelle approche, passer directement sous les cannes devant la berge. L’accueil est moins mauvais que prévu et cela semble même plus apprécié que de pagayer au loin.

Souvent, des ruines de grandes bâtisses ornent les hauteurs: châteaux, citadelles, remparts. Bien que le fleuve ne soit plus navigable sur de longues distances, tous ces vestiges révèlent son importance passée. L’impression de refaire un périple ancestral. Sûrement utilisé comme voie de commerce, le droit de passage se paye aujourd’hui en portage.

Fin d’aprem en face de l’hermitage de Caspe, perché sur une ile arête. Puis deux belles traversées face au vent, sensation des fjords norvégiens, euphorie de la lutte, la proue claque, comment des vagues peuvent elles se former en si peu de distance ? Forcer sur la pagaie, se concentrer sur la côte au loin, bientôt le bivouac.

Les falaises plongent et ne laissent aucune place plane. Quelques terrasses en surplomb, trop encombrées. Obligé de continuer mais heureux, le grand barrage n’en sera que plus proche. Les criques inhospitalières se succèdent, le soleil n’éclaire plus aucune berge et disparait sur les hauteurs. Un avancement plus ou moins plat apparait, des arbustes, je force l’imagination pour y discerner ma place du soir mais la conviction n’y est pas. Une aigrette marche sur les galets, je m’approche, elle ne s’envole pas. Elle ne s’envole pas. Ce n’est jamais arrivé, cet oiseau est le plus craintif de tous. Je dois m’arrêter ici.

Départ à 9h10, arrêt à 20h45, vu une mouette et un goéland, bon signe. Pas trop fatigué, le barrage de Mequinenza est à quelques encablures. Invention d’une nouvelle forme de pause aujourd’hui, eau fraiche jusqu’à la taille, le kayak fait table, jambes enfin protégées des piqûres et du soleil.

J11: Réveil avec les deux portes de la tente grandes ouvertes, aucun souvenir d’avoir fait ça. Toujours mal aux mains. 10 minutes après le départ je suis au barrage. Sur la rive droite, un débarcadère. Quelques personnes mettent à l’eau deux hors-bord avec deux grandes remorques, le kayak serait vraiment bien la dessus.

Je le laisse sur la berge et prend le plus d’affaires possible avec moi, au vu de la carte, ce sera long, autant alléger au mieux le rafiot, les sacs étanches jetés sur une épaule, la tente et deux trois babioles dans l’autre main, la pagaie sous le bras. Une piste serpente à flanc, grimpe puis redescend en pente douce. J’en ai suffisamment bavé sur les précédents portages pour savoir ce que celui là va m’infliger. Chaque pas en plus compte triple, deux allers, un retour.

Pas d’accès à l’eau de l’autre coté, j’avise un portail ouvert, une petite maison et un jardin qui descend jusqu’au fleuve. Quelques mots lancés en avançant, pas de réponse, juste un chien de bonne taille qui m’arrive droit dessus, un vieux sort de nulle part, agrippe la chaine qui lui pendouille au collier et tombe à la renverse. Pas sûr que mes excuses soient comprises, j’embraye sur mon problème de mise à l’eau. Cela semble bon.

Petites foulées pour rejoindre le kayak, l’idée que c’est pas idiot de faire travailler d’autres muscles au bout de 10 jours. Deux tiers de portage à se tuer les bras, ils deviennent de plus en plus inopérant et douloureux. Pas chassés avec les deux mains dans l’hiloire, puis une main dedans une main dessous, puis l’inverse, re-essayer le pas chassé. Pause tous les dix mètres, tétanisé, avec l’espoir constant de voir des gens apparaitre. Nouvel essai d’une méthode précédemment abandonnée: sur la tête. Douloureux mais moins que les bras. Chaussettes néoprène glissées sous mon tee-shirt au niveau des épaules et l’éponge dans la capuche pour amortir. Le dernier tiers est fait sans pause, c’est même la classe d’arriver comme ça devant les pêcheurs posés au fond jardin, on dirait que je maitrise le truc. Quelques paroles échangées, ils m’annoncent que le barrage prochain est identique.

Le fleuve est glacé, au premier coup de pagaie la différence est saisissante. L’eau relâchée par le barrage doit provenir du fond de la retenue. Le château de Mequinenza en impose sur son promontoire. Etendue d’eau large et calme, enfin troublée par deux bateaux à moteur, un ralenti pour minimiser la vague que je vais recevoir, c’est apprécié. A flanc de montagne, du béton à profusion, usine désaffectée ? Complexe militaire à l’abandon ? Après recherches, une cimenterie d’importance construite début XXieme.

Le second barrage arrive rapidement après avoir traversé une zone vierge de traces humaines, réserve naturelle oblige. Un accostage rive droite permet de grimper sur l’édifice est de le traverser. L’autre coté semble offrir un passage d’eau à eau plus court: reprendre le kayak, re-accoster, re-débarquer les affaires. Moins d’un kilomètre à effectuer. Le portage du kayak se fait directement sur la tête. Le pas lent et glissé, l’effort intense tout en douceur offre quelque chose d’intéressant et presque agréable. Ou alors c’est le matelas intercalé entre le haut du crâne et le fond du kayak qui fait bien son boulot.

Si l’eau était glacée plus haut que dire de celle-ci, encore plusieurs degrés de moins, l’envie de baignade s’estompe. Des algues impressionnantes font leur apparition, nappe dense qu’il faut éviter pour pouvoir pagayer correctement. Un petit barrage m’offre l’occasion de traverser un rond point fréquenté avec l’embarcation sur l’épaule. L’étrave légèrement en travers de la route arrête rapidement le trafic…

Un panneau d’information évoque l’ancienneté du barrage de Flix et indique un tunnel à bateau en amont permettant de couper à travers un lacet du fleuve. Rien vu de tout cela mais le fleuve est transformé en rivière de quelques mètres de large. Où est passée toute l’eau ? Presque pas de fond, la quille racle de temps à autres les graviers dorés et un petit rapide sous estimé manque de me faire chavirer.

Un peu de tension quant à l’aspect que va pouvoir revêtir la liaison de mon cours d’eau avec tout le débit de l’Ebre. Assez rapidement apparait un grand mur de ciment et une belle vague dessous, un large courant s’en échappe, les remous sont limités, le bateau se fait emporter sans trop de chahut. Je m’apaise et admire un peu plus loin les parois lisses de la cheminée de la centrale nucléaire de Vandellos. Elles sont à quelques mètres du fleuve, juste derrière un rideau d’arbres qui se transforme vite en barbelés.

Un nouveau barrage, un amoncellement de rochers. Le bruit, l’écume et les vagues qui s’en échappent permettent de couper court à la réflexion de le tenter. J’accoste à l’opposé de la centrale sous l’oeil du vigile et commence mes transferts d’affaires en jonglant dans le pierrier. Comme souvent, la mise à l’eau de l’autre coté est périlleuse, aucune zone sans courant, il faut charger le kayak et le tenir en même temps puis monter dedans alors qu’il est déjà entrain de partir. L’agilité vient avec l’usage, je peux enfin tenir l’équilibre avec une jambe dehors.

300m plus loin, la centrale relâche son eau sous forme d’une vague monstrueuse, j’en ai un haut le coeur rien qu’à la voir. Pris dans le courant, j’ai arrêté de pagayer et donne quelques coups en arrière pour me laisser un peu plus de temps d’estimation. En restant loin d’elle, en longeant la berge opposée, je devrais pouvoir éviter son jus. Mais problème, ce bord est encombré de branches basses, à raz de la surface sur plusieurs mètres. Impossible de s’arrêter, impossible de faire demi-tour, obligé de calculer la situation au mieux et au plus vite puis c’est la décision et la concentration, petite phrase de motivation « vas y, pagaie comme si ta vie en dépendait ». La rivière n’est pas plate, jamais vu ça, un plateau en plein milieu, sur-élevé de plusieurs dizaines de centimètres, j’avais bien vu que quelque chose clochait, un courant s’en échappe complètement perpendiculaire au sens de la rivière et file sous les arbres, je vais en plein dessus. Le jus me prend dans le travers et me pousse d’une traite vers les branches, réponse à la petite phrase dans la foulée « et bah c’est le cas ».

Merci la pagaie large, avec toute l’énergie possible mise dedans, je ne rentre que dans les branches souples et parvient à m’en extraire en même temps que le courant reprend sa direction normale. Il y a un jus pas possible et la tension ne diminue pas, l’inquiétude d’un nouveau passage comme celui là. Des bouées de balisage apparaissent mais elles sont invisibles: le courant les couchent sous l’eau.

Toute cette masse d’eau mouvante, ces tourbillons sombres, l’impression que c’est trop maintenant. S’arrêter sur un rocher plage envahi d’insectes et poser le bivouac en vitesse. Baignade, évacuer la chaleur et l’adrénaline, se laver un peu puis séchage en courant tout nu autour de la tente poursuivi par la horde de simulies, essorer les fringues en même temps.

Premier coup de pagaie à 8h05, arrêt à 20h35. Crème contre les irritations finalement utile. L’ongle le plus amoché tombe aujourd’hui.

J12: Départ à 7h35, l’appréhension de la veille est atténuée, pouvoir de nouveau se concentrer sur la beauté des lieux. En même temps que le refroidissement, l’eau s’est encore éclaircie, il est possible de voir le fond à plusieurs mètres. En corollaire, c’est d’autant plus impressionnant quand il devient invisible. Les poissons n’apparaissent plus uniquement sous la forme d’un dos sombre ou d’un remous, il devient possible de les nommer. En majorité des carpes, quelques gros poissons blancs, parfois un brochet à l’orée d’une forêt sous-marine.

Pas mal de vallons, de ruines, de villages, quelques plages de galets. Des zones à forts courants ou le fond défile à toute vitesse sans même avoir besoin de pagayer. Les tripes qui se serrent un peu (trop) quand des vaguelettes écumantes apparaissent. Un barrage, le premier avec une écluse, j’opte pour le passage habituel à la main.

Sur un bas fond, je me fais percuter par une carpe dérangée dans sa fouille. Seconde fois depuis le début, une dizaine de kilos lancée à pleine vitesse, l’impact n’est pas anodin.

Hier, coup de fil en France à Margot pour connaitre les échappatoires, l’idée est de trouver un bus pour Barcelone. Apparemment il n’y pas beaucoup de choix, aller jusqu’à la mer va me compliquer énormément. Le plus simple est de s’arrêter un peu avant, à la ville de Tortosa où un bus va direct à la capitale catalane, les dates coïncident en plus avec un covoiturage pour Bordeaux.

Arrivée à 14h, le lessivage du kayak, du bonhomme et le rangement de l’ensemble me prennent 2h. Les sacs sont laissés à la gare routière, visite de la ville et de ses kilomètres de remparts, nuit sur un banc et bus à 5h30 du matin le lendemain.

 

Epilogue

Fin d’un projet plus imposant que sa prévision initiale. Le peu de temps de préparation, le manque d’informations et l’optimisme quant aux conditions de navigation ont conduit à un engagement plus important que prévu. Aucun regret, une somme d’expérience acquise monumentale mais une piqure de rappel sur la notion de marge de manoeuvre. Si celle-ci n’a jamais été réduite au point de vouloir abandonner, le fait de ne pas être allé acheter un casque et un gilet en cours de route est plus questionnable. Peut être encore une fois l’optimisme d’avoir passé le plus gros à chaque fois.

En ce qui concerne les lieux, ce fut une succession de découvertes. L’exploration des fjords norvégiens deux mois auparavant avait mis la barre haute et je craignais la monotonie d’un fleuve. Mais les différences notables de climats et de paysages entre la côte Atlantique, le centre et l’approche de la Méditerranée, les alternances de campagnes, de forêts, de vallons plus ou moins désertiques empêchent tout ennui. Sur la fin, l’eau translucide offre une nouvelle dimension à regarder et à refaire en partie, ce serait ces portions que je choisirais.

Pour le kayak, constater qu’il est possible d’enchainer des journées d’une centaine de kilomètres ouvre des opportunités dingues. Les milliers de kilomètres du Danube semblent bien plus abordables et le Groenland gagne quelques places dans la liste des projets en attente.  Question embarcation, bien que le Narak ne soit pas le plus adapté à la descente d’un fleuve mouvementé, il s’est remarquablement comporté sous les contraintes. Il ressort de ce projet comme neuf, aucune casse n’est à déplorer malgré des rencontres plus ou moins violentes avec la roche locale. Sa légèreté est appréciable, tout comme sa rapidité. Ses défauts (taille, instabilité, faible espace de stockage) ne sont finalement que le revers obligatoire de ses qualités.

A noter l’existence du GR 99 qui suit plus ou moins l’Ebre sur toute sa longueur et affiche 1280km. En le prolongeant un peu en amont, on obtient une traversée de mer à mer faisable à pied ou à vélo.

 

14 réflexions sur “Kayak: descente du fleuve Ebre en Espagne, 700km

  1. Bonjour,

    MUL à mes heures et naviguant en Nautiraid Narak 460 depuis quelques années maintenant, je découvre avec plaisir vos raids en 550. Initialement, j’avais pris le 460 pour sa plus grande capacité à loger du matériel (plus petit mais plus large, et initialement le seul Narak monoplace équipé de stabilaires pour moi qui débutait), et sa plus grande modularité (plus court, donc davantage passe partout). Au final, j’ai surtout un programme « mer » et le 550 m’intéresse de plus en plus dans sa version sans stabilaire pour un programme plus radical. J’avais en revanche compris qu’on ne pouvait pas charger grand chose dedans et donc pas vraiment randonner avec, à plus forte raison par temps froid…

    Pouvez-vous m’éclairer sur le volume de matos embarqué et embarquable sur le 550, et la manière de le ranger (exterieur et intérieur) pour garder une certaine stabilité sécurisante ?

    Merci et bravo pour vos aventures !

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    • Bonjour,
      Tout dépend de l’optimisation de votre matériel. Pour le périple Kayaski (https://sebastienlhorty.com/2015/05/20/kayaski-lyngen/), nous l’avons poussé très loin et nous avons pu embarquer des skis de rando, tout le matos d’alpi (corde, crampons, piolet, etc), de quoi bivouaquer à -20 et plus de 10kg de nourriture chacun.
      Dans notre cas, nous avons tout de même dû mettre les grosses pièces à l’extérieur ce qui n’est pas idéal pour la prise au vent et l’équilibre. A l’intérieur, le volume reste conséquent malgré la presence des réserves d’air et il me semble tout à fait possible d’y loger l’intégralité du matos hivernal et la nourriture.

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      • Bonjour,

        J’ai regardé votre périple « Kayaski-lyngen »…Wouah !!! je n’aurais jamais cru possible de charger autant de matos dans un Narak.
        Je m’intéresse à ce kayak pour un projet de Rando au Groenland. Sauriez-vous quelle était la charge totale que vous aviez par kayak?(kayakiste + matos)

        merci

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      • Bonjour,

        Je fait autour de 77kg et Yann doit faire pas loin de 10 de plus. Avec le matériel et la nourriture, nous devions être entre 110 et 120kg. Le Narak supporte cette charge sans soucis.
        Le problème vient du fait que ce kayak est plus difficile à esquimauter qu’un kayak groenlandais classique (pont plus bas pour caler les jambes) et qu’il n’a pas la stabilité d’un kayak de mer plus large. L’esquimautage est la seule vrai sécurité dans ces eaux très froides. Donc soit vous avez une technique d’esquimautage parfaite applicable au Narak, soit il vous faudra regarder vers une autre embarcation.
        Si je devais choisir un kayak (le Narak ne m’appartient pas), la seule question qui m’intéresserait serait de savoir si il est facile à esquimauter. La charge utile ne viendrait que loin après, pour le matos, la nourriture, il y a toujours moyen d’optimiser.

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  2. oui, tout à fait d’accord avec la maitrise des esquimautages. c’est la clef pour se sentir à l’aise dans son kayak. La pratique régulière des fondamentaux (standard, reverse et stormRoll) est un gage de sécu et de confort d’esprit.
    Je suis habitué au Kmer étroit (51cm) et j’aime bien roulé ;-). Reste à voir les calages et la hauteur du pont arrière effectivement, il faut que que je trouve le moyen d’essayer le Narak. Sinon, les tubes de calage du Narak ne sont pas efficaces?
    Pour la charge utile c’est une question récurrente quand on navigue sur un Anasacuta (typé Groenlandais) qui a un faible volume comparé aux autres Kmer (surtout lorsque l’on atteint 85kg, comme moi), Le risque est de faire le sous-marin…

    Le voyage avec un pliant doit être bien sympathique.

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  3. Bonjour,

    Merci pour cette réponse. A vrai dire, une de mes inquiétudes pour le Narak 550 était sa charge utile annoncée à 110kg sur le site Nautiraid, je trouvais ça short et je m’étais tourné vers le modèle en 460, indiqué à 130kg. La plaque d’immatriculation du bateau indique en fait 150kg, donc j’imagine qu’elle doit être à 130 pour le 550, le site devant annoncer une marge de sécu.

    De mon expérience sur Nautiraid, c’est top pour voyager, ça navigue bien et plutôt vite (pour la gamme Narak sans stabilaire), même comparé à des rigides de très bon niveau, mais c’est effectivement plus dur à esquimauter, car la structure d’un pliant est toujours plus haute que celle d’un rigide, il faut bien pouvoir rentrer l’ossature par quelque part… Après, si c’est pour du long cours, je pense que l’idéal aujourd’hui est le 550 avec stabilaire (modèle assez récent je crois). Il sera un peu moins rapide et peu voir pas esquimotable (à moins d’une grosse maitrise, j’ai au moins une video de quelqu’un qui le fait), mais il sera très stable, sécurisant et portera plus lourd que le 550 sans stabilaire. Pour pouvoir les tester, le top est d’aller aux journées porte-ouverte que Nautiraid fait plusieurs fois par an. J’ai pu tester les différents modèles comme ça, c’est mieux avant achat vu le prix tout de même important.

    Pour du 550 sans stab plus chargé (ce qui m’intéresse actuellement), je serai curieux de tester le remplacement des gonfles d’origine par des gonfles qui se chargent en affaires, type futa floatbag…

    A+

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    • Ah si, j’oubliais un truc pour voyager ou prendre un peu plus de risques en kayak pliant: une chaussette (seasock, reed chillcheater en fait de très bien) est indispensable. ça compartimente le cockpit comme sur un rigide, plus de problème de remplissage d’eau du kayak en cas de dessalage. Plus encore que l’esquimotage, c’est vraiment indispensable niveau sécu et confort mental.

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      • Les tubes de calage du Narak sont assez haut, il faut plier la jambe pour les atteindre et garder une bonne pression dessus. Surement un coup à prendre mais pour débuter, ce n’est pas idéal. Et surtout, le pont avant est vraiment haut, pour le storm roll, ce n’est pas pratique.

        Le 550 avec stabilaire est surement une bonne embarcation mais perso je regarderais bien du coté du Grand Narak double place, voir comment il se comporte avec le pontage une place. Un seul kayak et deux possibilités, sur le papier c’est attrayant !

        J’ai reçu la semaine dernière mon pliant groenlandais. Plus de 5m de long, 50cm de large, un seul sac de moins d’un mètre et temps de montage au moins 2 fois inférieur au Narak (qui, reconnaissons-le, est bien galère à monter). Il est également très bas sur l’eau et donc facile à esquimauter. Le revers étant que le volume intérieur et la charge max sont inférieurs au Narak. Je devrais être dans les Hébrides avec autour de fin février, je ferais un retour sur le site et un comparatif (le collègue sera en Narak).

        Pour les réserves d’air faisant aussi sac de stockage, je suis mitigé, déjà se pose le problème de leur mise en place à chaque fois. Même avec le système de poulie du Narak, cela me semble bien compliqué et fastidieux. Et la fiabilité forcément inférieure ne m’emballe pas. Surement à utiliser en dernier recours afin de ne rien avoir sur le pont.

        Pour la chaussette, on trouve autant d’argument pour que contre. Je pense que c’est vraiment un choix personnel plus qu’une solution miracle. J’ai la Reed, sur le Narak cela ne doit pas poser trop de problème mais sur ce nouveau kayak étroit, faut encore que je teste toute les situations possibles avant de me prononcer.

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  4. Merci pour vos réponses précises…une aide précieuse pour se faire une idée des contraintes liées au design du Narak. La rehausse du siège pourrait peut être aider pour esquimauter sur l’arrière. Le storm est le plus efficace et le plus dur à maitriser, mais le seul vraiment efficace lorsque le pont est chargé (m’a confié un champion des esquimos Groenlandais). Avec de l’entrainement, cela devrait passer…
    Le 5m groenlandais ne serait pas un Narval, par hasard..? J’ai vu leur présentation de très beau protos sur leur page FB…
    Pour ma part, j’aurais du mal à m’orienter vers un Narak à stabilaires et perdre tout le plaisir du contrôle d’un Kmer…où alors seulement dans la perspective d’une location ponctuelle.
    Concernant le montage du Narak, savez-vous si la structure alu facilite le montage? Il y aussi le Trak 2.0 qui à l’air pas mal sur le papier…

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  5. Le Grand Narak en solo, j’ai essayé mais pas trop aimé perso. Le siège est déplacé au milieu, il y a du coup peu de calage. La capacité de chargement est énorme en revanche, mais il faut quand même y aller pour le faire avancer, ce que je trouve frustrant comparé à un solo. A 2, ça doit être bien et avancer vite, mais je trouve que 2 solo sont plus sécurisant en cas de mec à l’eau qu’un grand biplace (sans seasock de fait) rempli d’eau. Je ne me sépare plus de la seasock depuis un gros plan galère par mer formé au large de Quiberon… Après, je préférerai un modèle « boxed » avec plus de place aux pieds et des attaches dans la structure pour maintenir la forme, mais je n’ai pas trouvé pour le mien.

    Un pliant type groenlandais qui s’assemble vite, là, je suis très curieux !! Dans le genre, le Trak 2.0 qui sort à l’été s’annonce pas mal, mais le système de pistons a l’air de moins tenir dans le temps que les leviers Nautiraid, plus rustiques mais plus « bombproof »… J’aimerai bien l’essayer cela dit.

    Bon raid aux Hébrides, je suis déjà impatient d’en lire le retour !! 🙂

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  6. Alors alors, cet essai du Narval (j’imagine ?), ça donne quoi en rando comparé au Narak ? J’espère que tout s’est bien passé aux Hébrides en tout cas !

    Un lecteur impatient 🙂

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    • Le tri des photos est en cours ! Nous avons fait un peu moins de 300km sur la côte ouest de l’Ecosse, la météo ne nous a cependant pas permis de tenter les Hébrides. En Narval Kitaa pour ma part et Samuel en Narak. Si en mer il n’y a pas de grande différence (vitesse et équilibre similaire, même tendance à monter au vent), cela se joue sur d’autres paramètres: le Narval est plus bas sur l’eau, moins de capacité d’emport mais une embarcation plus légère et tenant dans un seul sac en soute. L’un est plus polyvalent et joueur (le Balance Brass est une formalité par exemple), l’autre sera plus adapté à des expéditions longues.
      Je détaillerais plus dans l’article 😉

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